Le In retardé, le Off en avance - (05/07/2014)

Le 4 juillet, l’ouverture du 68e festival d’Avignon a été proclamée par son directeur, Olivier Py, mais la manifestation a commencé sans spectacles ! Le personnel avait en effet voté la grève pour le jour même. Le Prince de Hombourg et Coup fatal n’ont pas été représentés. En revanche, les spectacles des jours suivants devraient avoir lieu, mais des préavis de grève ont été déposés pour les 7 et 12 juillet. Se disant "plus uni que solidaire avec les intermittents", Olivier Py a déclaré lors de sa conférence inaugurale : "C’est une communauté d’esprits qui se réunit et qui continue, pour comprendre le monde et répondre à toutes les formes d’inquiétudes et d’impatiences. Nous sommes dans un monde inquiet où le théâtre est le plus haut geste politique"
Profitant de cette panne de spectacles dans le In, le Off a largement ouvert ses portes pour commencer quasiment avant la date prévue (le 4 n’était a priori qu’un jour de "représentations générales") et recevoir la presse sans tarder. Parmi les quelques pièces vues ce premier jour, c’est Livingstone de Sergi López et Jorge Picó qui a emporté notre adhésion la plus forte. Sergi López est un acteur très connu, mais on ignore souvent son activité théâtrale comme auteur et interprète. Ce qu’il fait avec son partenaire Picó – aussi remarquable que lui, mais dans une partition quasi muette – ne ressemble à rien et ne peut guère se raconter. Un homme a toutes les peines du monde à se détacher de son père et de sa férule ; il s’en va quand même, arrive dans un endroit où il rencontre un homme à tête de cerf et se montre encore plus féroce que ne l’était son père. Le résumé ne peut indiquer combien cette heure et quart est drôle, inattendue, réjouissante, surprenante. Sergi López a une présence incroyable. Il passe son temps à enlever et à mettre son t-shirt, s’amuse de sa rotondité (il a du ventre, ce bel homme ! ), danse sans le moindre complexe, se met en fureur et en joie, suit une pensée tout en zig zag, joue un parfait duo fait d’accords et de ruptures. C’est tout le temps une offense au bon goût, à la logique et à la pensée bien-pensante. Si l’on ne se laisse pas dérouter par cet humour, dont on ne sait pas s’il est catalan ou personnel,  l’envol est immédiat et l’on reste dans des hauteurs tout à fait folles de la première à la dernière seconde. 

Gilles Costaz

30/40 Livingstone, de et avec de Sergi López et Jorge Picó.
La Luna, salle 1,1 rue Séverine 84000 à 19h25, 04 90 86 96 28 Avignon

 
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