Critique Off - Si une histoire frappe à ta porte – Un vertige théâtral sur la création

Le point de départ de Si une histoire frappe à ta porte séduit d’emblée par sa promesse vertigineuse : comment inventer une histoire qui n’ait jamais été écrite ? Voilà l’interrogation qui hante l’écriture depuis la nuit des temps, l’essence même du théâtre et de toute création artistique. Cette quête, David Guez et sa compagnie la transforment en une remontée haletante à travers les siècles, interrogeant tour à tour Boris Vian, George Sand, Shakespeare, Chrétien de Troyes, Sophocle… Chaque auteur est convoqué sur scène pour révéler ses secrets face à la nouveauté, dans un cheminement aussi drôle qu’instructif. La pièce nous entraîne sur les traces de ces génies, chacun livrant sa méthode ou son doute, et de fil en aiguille, jusqu’aux premières histoires, celles de la grotte de Chauvet. La mise en scène est aussi dépouillée qu’enlevée : avec pour tout décor une table, une chaise, une machine à écrire et une guitare, trois comédiens se saisissent de tous les rôles avec un égal talent, glissant d’un siècle à l’autre avec énergie et finesse. L’adresse, la complicité et la justesse du trio embarquent sans relâche le public. Le seul bémol : à force de répéter ce schéma de rencontres d’auteurs, la mécanique s’essouffle légèrement dans la dernière partie. Mais grâce à une touche finale réjouissante – dont nous tairons la clé –, le spectacle tient sa promesse et interroge chacun sur sa propre part d’invention. Un hommage ludique et pertinent à la transmission éternelle des histoires.